La va-t-en-guerre pro-Ukraine qui préside la Commission européenne a un pedigree nazi qu’elle ne veut pas que vous connaissiez

La va‑t‑en‑guerre pro‑Ukraine
qui préside la Commission européenne
a un pedigree nazi
qu’elle ne veut pas que vous connaissiez

Par Evan Reif

Une publication CovertAction Magazine


Fascisme Extrême droite Racisme Esclavagisme Colonialisme Guerre Propagande Corruption Contre-histoire Histoire
Allemagne Ukraine États-Unis Russie URSS Europe Amériques Afrique Union européenne
Article

Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais


Son père, Ernst Albrecht, président du land allemand de Basse-Saxe de 1978 à 1990, a intégré des nazis non réhabilités dans son administration et a mené une opération terroriste sous drapeau noir destinée à discréditer l’organisation de gauche de la Fraction armée rouge (FAR).1

*

Dans le sillage de la guerre russo-ukrainienne, des termes comme « valeurs européennes » sont revenus sur le devant de la scène. L’une des personnes les plus responsables de ce retour est Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, qui est désormais une figure quasi omniprésente dans les médias.

Ursula von der Leyen : « Le mode de vie européen, c’est aussi s’écouter et débattre les uns avec les autres pour trouver des solutions pour le bien commun. C’est ce que je veux que nous fassions ensemble.
En savoir plus 👉 europa.eu/!TH84Cq »
Illustration : « Nous avons tous nos propres traditions, nos propres valeurs et notre propre façon de faire les choses.
Mais, je choisirais toujours le mode de vie de l’Europe — et notre union de solidarité, de tolérance et de fiabilité — plutôt que tout autre. »

Selon von der Leyen, les « valeurs européennes » ne représentent rien d’autre que les attributs les plus élevés de l’humanité : liberté, justice, solidarité et État de droit.

Bien sûr, toute personne ayant ne serait-ce qu’une vague connaissance de l’histoire peut vous dire qu’il ne s’agit là que de paravents. Il n’y a pas si longtemps, les « valeurs européennes » avaient un sens très différent. Elles ont tracé les frontières du monde dans des océans de sang : le sang des Européens et le sang des peuples qui ont été conquis. Un regard sur l’histoire de la famille aristocratique européenne d’Ursula von der Leyen peut nous montrer le vrai visage de ces « valeurs européennes » et comment la classe dirigeante les a imposées au monde pour son plus grand profit.

Ursula von der Leyen à cheval lors d’une compétition équestre en 2007
[Sean Gallup]

Les péchés du père

« Si nous parvenons à faire participer à la gouvernance des personnes aux capacités supérieures à la moyenne, une autocratie, ou le pouvoir de quelques-uns, sera en mesure de créer un meilleur ordre que le pouvoir du peuple. »

(Ernst Albrecht, L’État, idée et réalité — Esquisses d’une philosophie politique [Seewald Verlag, 1976])

Ernst Albrecht avec sa « Röschen » bien-aimée
[Picture Alliance / DPA]

Blason des von der Leyen

Ursula von der Leyen est issue de deux familles aristocratiques allemandes. Elle est née Ursula Albrecht, fille d’Ernst Albrecht, un important fonctionnaire européen, leader du parti CDU (Christlich Demokratische Union / Union chrétienne-démocrate) et ancien gouverneur de Basse-Saxe. La famille a soigneusement entretenu une image cosmopolite, Ernst ayant passé la majeure partie de sa vie à travailler pour l’UE et diverses organisations précurseures. En grandissant, Ursula était surnommée « Röschen » (Rosie) par son père, et les images de cette famille heureuse figuraient en bonne place dans le marketing politique de son père.

Blason des Albrecht

La famille Albrecht a fait fortune en profitant de sa position d’agent des douanes dans le Saint-Empire romain germanique pour dominer les marchés du coton de Brême au XIXe siècle ; c’est à partir de là que le nom d’Albrecht s’est imposé dans toute l’histoire allemande.

L’histoire de cette famille, par ailleurs exhaustivement documentée, présente une mystérieuse lacune entre 1936 et 1945, ce qui est typique chez les Allemands bourgeois. Pour éviter les questions gênantes sur l’origine de leur pouvoir et de leur argent et sur ce qu’ils ont fait pour les gagner, les Albrecht, comme tant d’autres, se contentent de prétendre que le régime nazi n’a tout simplement jamais existé. Puisque nous n’aurons jamais de réponses, peut-être que si nous braquons une lumière sur ce qui entoure ce vide, l’ombre que cela projettera pourra nous montrer la véritable forme des « valeurs européennes » qu’Ursula von der Leyen affectionne tant.

Pour commencer, nous pouvons examiner le premier emploi d’Ernst Albrecht en politique, au sein de la Commission européenne du charbon et de l’acier, sous la direction d’un autre aristocrate, Hans von der Groeben.

Hans von der Groeben
[Joop van Bilsen / Anefo]

À cette époque, von der Groeben était déjà un fonctionnaire de longue date. Pendant la guerre, il travaillait comme adjoint au ministère de l’Agriculture du Reich, sous le commandement de Richard Walther Darré. Darré était un nazi fanatique ; il a écrit sa première propagande fasciste en 1926 et a adhéré au parti nazi en 1930.

Il a rapidement rejoint les SS, et sa loyauté et son dévouement à la cause ont amené Heinrich Himmler à choisir personnellement l’Obergruppenführer Darré comme chef du bureau pour la race et le peuplement (Rasse- und Siedlungshauptamt / RuSHA), puis chef du ministère de l’Agriculture du Reich. Darré était l’un des principaux idéologues du parti, et il a combiné les tâches des bureaux de l’agriculture et de la race pour jeter les bases du Generalplan Ost,2 le plan nazi visant à exterminer toute la race slave et à coloniser l’Europe de l’Est.

Richard Darré était l’architecte des politiques agraires nazies, « le sang et le sol » (« Blut und Boden »), et cherchait à créer une nouvelle aristocratie « aryenne » propriétaire de terres. Il a fait passer des lois exigeant un « certificat aryen » pour hériter de terres agricoles et a joué un rôle déterminant dans les programmes eugéniques nazis, en particulier le programme Lebensborn conçu pour engendrer une nouvelle génération de surhommes « aryens » et purger le peuple allemand des « lignées indésirables ».

Richard Walther Darré serrant la main d’Adolf Hitler
[Heinrich Hoffmann / Studio of H. Hoffmann]

L’un de ses acolytes les plus prometteurs était un médecin du nom de Josef Mengele, chargé des politiques de « santé raciale » au sein du département. Mengele deviendra plus tard le tristement célèbre ange de la mort qui a commis certains des crimes les plus ignobles de l’histoire avec ses expériences médicales à l’échelle industrielle au camp de concentration d’Auschwitz. Il ciblait particulièrement les enfants comme victimes et les maintenait en vie pendant des mois pour obtenir le plus de données possible. Il n’a jamais oublié d’où il venait : il a toujours cité Darré comme source d’inspiration pour ses idées sur « l’hygiène raciale ».

Certaines des victimes de Mengele, après leur libération par l’Armée rouge
[Archives d'État du film documentaire et de la photographie de Biélorussie (photographie tirée d'une séquence enregistrée par les forces soviétiques)]

Josef Mengele, connu de la CIA sous le nom de Helmut Gregor
[US Holocaust Memorial Museum]

Après la guerre, Mengele a échappé à la justice en s’enfuyant en Argentine, puis au Brésil, grâce aux réseaux d’exfiltration nazis (les ratlines) exploités par Reinhard Gehlen, l’agent de la CIA, futur chef des services secrets ouest-allemands et nazi non réhabilité ; Mengele a été protégé sous l’ordre personnel du directeur de la CIA, Allen Dulles, qui considérait le médecin comme un allié utile dans sa guerre contre l’URSS. Mengele est mort en homme libre en 1976 et a été enterré sous le nom de Wolfgang Gerhard à São Paulo, au Brésil.

Darré est fier de son travail. Il a écrit des milliers de pages exposant ses plans dans diverses publications et a régulièrement prononcé des discours dans l’Allemagne nazie pour promouvoir ses idées.

« […] par une guerre éclair […] avant l’automne […] nous serons les maîtres absolus de deux continents […]. […] une nouvelle aristocratie de maîtres allemands sera créée. [Avec] des esclaves qui lui seront assignés, ces esclaves seront leur propriété et seront composés de ressortissants sans terre, non allemands. […] nous avons en fait à l’esprit une forme moderne d’esclavage médiéval que nous devons introduire et que nous introduirons parce que nous en avons un besoin urgent pour accomplir nos grandes tâches. Ces esclaves ne seront en aucun cas privés des bienfaits de l’analphabétisme ; l’enseignement supérieur sera, à l’avenir, réservé à la seule population allemande d’Europe. […] »

(Richard Walther Darré, LIFE Magazine, Vol. 9, No. 24, 9 Dec. 1940, p. 43-44)

Avec Hans von der Groeben, ils ont mis en œuvre ce que l’on appelle le Hungerplan (le Plan de la faim) pour nourrir le Reich aux dépens des territoires conquis. Des millions d’esclaves travaillaient sur les rations de la faim, forcés d’envoyer chaque morceau de nourriture au Reich où il serait utilisé pour littéralement soutenir la machine nazie qui les opprimait. En 1944, plus de 15 millions de tonnes de denrées alimentaires ont été réquisitionnées en URSS, ce qui a entraîné la mort intentionnelle par famine de plus de 10 millions de personnes. Selon le plan de Darré, après avoir été stérilisés et morts de faim, les « Untermensch » (les « sous-hommes ») slaves devaient être remplacés par la nouvelle race d’aristocrates « aryens » de Darré, prête à utiliser ces terres au profit du Reich.

Après la guerre, Richard Darré a été arrêté et jugé pour crimes de guerre à Nuremberg. Il a été reconnu coupable, mais, malgré la portée et l’ampleur de ses crimes, il n’a reçu qu’une peine de sept ans. Il n’en a purgé que trois et a été libéré en 1950. Il est mort d’un cancer du foie en 1953. Bien que cette peine soit scandaleusement clémente, cela aurait pu être pire. Hans von der Groeben, quant à lui, n’a jamais vu l’intérieur d’une salle d’audience.

C’était très courant après la guerre. Les « internationalistes libéraux » tels qu’Allen Dulles, responsable de la politique étrangère américaine, n’étaient pas inquiétés par les crimes du régime nazi. En effet, dès 1940, Dulles plaidait déjà pour une alliance avec l’Allemagne nazie, et en 1944, il rencontrait les services de renseignement nazis pour organiser une paix séparée afin de les utiliser comme arme contre l’URSS.

Allen Dulles

Ils n’ont demandé des procès que pour les nazis les plus flagrants et, même dans ce cas, ils ont veillé à ce que leurs peines soient aussi légères que possible. La base du régime nazi, l’armée de personnes qui ont physiquement permis à la machine nazie d’accomplir le travail meurtrier d’asservissement et d’extermination d’un continent entier, est restée presque entièrement impunie pour ses crimes.

Dans le cas de personnes comme Hans von der Groeben, elles ont été récompensées par des emplois dans le nouveau gouvernement ouest-allemand « dénazifié ». Malgré les prétentions d’une nouvelle Allemagne, seuls les noms ont changé. Les mêmes bureaucrates travaillaient pour atteindre le même objectif : la destruction de l’Union soviétique et de son peuple par tous les moyens nécessaires. L’appareil d’État, autrefois appelé le Grand Reich germanique, a tout simplement été absorbé par une nouvelle structure désormais appelée Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN).

Dorénavant en position de député, Ernst Albrecht endossait le même rôle que son patron dans les années 1940, cette fois avec « le sang et le sol » remplacés par les « valeurs européennes ».

Bien qu’il ait été trop jeune de quelques années pour avoir été lui-même un nazi, il a, tout au long de sa longue carrière politique, manifesté très clairement ses sympathies. C’était un élitiste qui méprisait les gens ordinaires et voulait instaurer en Allemagne ce qu’il considérait comme le pouvoir de l’élite, par opposition au pouvoir de la foule « plutôt obtuse ».3 Étant donné qu’il ne manquait jamais une occasion de vénérer le Troisième Reich et ses tueurs, il est très clair qui il considérait comme une élite.

« Le pouvoir du peuple, en particulier le pouvoir direct, est essentiellement tel que les décisions ne sont pas déterminées par la perspicacité4 [de l’élite], mais plutôt par le niveau moyen commun basé sur la majorité de la population. »

(Ernst Albrecht, L’État, idée et réalité — Esquisses d’une philosophie politique [Seewald Verlag, 1976])

Lorsqu’il dirigeait le gouvernement de l’Union chrétienne-démocrate dans l’État de Basse-Saxe, Albrecht a réussi à attirer dans les rangs du parti (l’un des deux plus grands d’Allemagne) des membres du Parti impérial allemand (Deutsche Reichspartei / DRP), une formation politique néonazie. Le DRP pratiquait ce que l’on appelait l’ésotérisme hitlérien [ou mysticisme nazi, ou ésotérisme nazi (NdT)], une variété bizarre de néonazisme qui prétendait qu’Hitler était la réincarnation exacte du dieu hindou Vishnu et que les « Aryens » du nazisme étaient les mêmes que les Aryens qui habitaient autrefois l’Inde ancienne.

Savitri Devi

Cette idéologie a été créée par Savitri Devi, une espionne nazie d’origine française qui avait été expulsée d’Allemagne en 1951 pour avoir diffusé à plusieurs reprises de la propagande nazie. Elle a rejoint le DRP par l’intermédiaire de son ami le plus proche, le pilote nazi Hans-Ulrich Rudel, qui travaillait comme marchand d’armes pour les fascistes sud-américains et complotait activement pour renverser le gouvernement allemand en faveur d’une dictature nazie.

Hans-Ulrich Rudel

Rudel et Devi pensaient que, s’ils parvenaient à construire un nouveau Reich, Hitler se réincarnerait une fois de plus en dieu hindou Kalki pour purifier toutes les races inférieures et conduire le peuple « aryen » vers un paradis appelé Hyperborée. Malgré cela, la CDU d’Albrecht absorbe presque entièrement le DRP, de peur que le second n’érode la base électorale du premier. La stratégie consistant à faire des courbettes aux nazis fonctionne et la CDU d’Albrecht gouverne la région sans interruption de 1976 à 1990.

Lorsqu’il est arrivé au gouvernement, l’une des élites à qui Albrecht a confié des pouvoirs était son ministre de la justice, un juriste du nom de Hans Puvogel. Une fois de plus, il a choisi un nazi fanatique. Puvogel a rejoint la Sturmabteilung, la branche paramilitaire du parti nazi, en 1934 et, en 1937, il était un leader régional du parti nazi allemand (NSDAP). Puvogel a utilisé ses compétences d’avocat pour aider à justifier l’extermination des ennemis raciaux des nazis. Dans sa thèse de doctorat, il a plaidé pour l’euthanasie et la stérilisation de masse de toutes les races inférieures comme moyen de résoudre le « problème racial » nazi.

Lorsqu’il a été démasqué en 1978, Hans Puvogel a menti : il a déclaré qu’il faisait partie d’un petit groupe de droite appelé Casque d’acier qui a été absorbé par le parti nazi, mais a maintenu qu’il n’avait aucun passé nazi. Des documents publiés par le parlement de Basse-Saxe en 2012 ont prouvé que c’était un mensonge. Puvogel n’a même jamais essayé de prendre ses distances avec le contenu de sa thèse, et, pour autant que l’on sache, il est parti dans la tombe en nazi convaincu. Pour sa part, Ernst Albrecht n’en a tout simplement jamais parlé. Il n’a pas eu à faire face à de réelles conséquences ; la stratégie consistant à faire comme si le Troisième Reich n’avait jamais existé s’est avérée payante une fois de plus.

Hans Puvogel (deuxième, à partir de la gauche) avec Ernst Albrecht (au centre) et son cabinet, en 1977
[Wolfgang Weihs / DPA]

« La valeur d’un individu dans la communauté est mesurée par sa personnalité raciale. Seule une personne de valeur raciale a le droit d’exister au sein de la communauté. Une personne inutile à la communauté en raison de son infériorité, ou même nuisible à celle-ci, doit être éliminée. »

(Hans Puvogel, thèse de doctorat, 1936)

Albrecht ne se contente pas de travailler pour les nazis, de remplir son cabinet de nazis et d’inviter des nazis dans son parti ; il passe également beaucoup de temps à courtiser les électeurs nazis. Ses députés et lui-même étaient présents aux événements organisés par les vétérans nazis dans toute la Basse-Saxe.

Wilfried Hasselmann, affiche électorale, 1970

Le vice-ministre d’Albrecht, ami proche et officier nazi, Wilfried Hasselmann, a même prononcé le discours principal lors d’un dîner de l’Association de la Croix de Chevalier en 1978, dans lequel il a vénéré les pires tueurs du Reich d’Hitler comme des hommes braves et honorables, dont le courage était un exemple pour les générations futures qui seraient inspirées par leurs « valeurs européennes ».

Albrecht et Puvogel ont également été impliqués dans un attentat à la bombe connu sous le nom de scandale du trou de Celle (Celler Loch, en allemand). Le 25 juillet 1978, une bombe a explosé contre le mur de la prison de Celle, en Allemagne. Elle n’a pas eu l’effet escompté, ne créant qu’un petit trou, et un groupe de 12 hommes qui devaient entrer dans la prison a été contraint de s’enfuir. Les auteurs de l’attentat se sont échappés, mais une Mercedes a été retrouvée chargée d’un radeau en caoutchouc, d’outils d’évasion, d’une arme de poing Walther et de faux passeports, dont l’un portait la photo du militant de gauche emprisonné Sigurd Debus. Plus tard, des outils ont été placés dans la cellule de Debus pour en terminer avec cette affaire, la faisant ressembler à un plan d’évasion raté de la Fraction armée rouge (FAR).

Sigurd Debus

Albrecht a salué les attaques comme une opération réussie qui, selon lui, a permis d’arrêter un vol et un meurtre (il n’a fourni aucune preuve à cet égard), et l’incident a été utilisé pour justifier la détérioration des conditions de détention de Debus et d’autres membres de la FAR. Celle-ci a répondu par une grève de la faim qui a finalement conduit à la mort de Debus en 1981.

Cependant, l’histoire n’a jamais été tout à fait cohérente. Les membres de la FAR ont maintenu leur innocence, et la pression croissante des avocats et du public a finalement conduit à une enquête parlementaire en 1986, qui a conclu qu’il n’y avait pas eu de tentative d’évasion, de vol ou de meurtre, et que toute l’affaire était un attentat sous fausse bannière appelé Opération Feuerzauber (Magie du feu), planifié par la police fédérale allemande et la police de Basse-Saxe avec l’approbation d’Ernst Albrecht. Un des policiers a même fait exploser la bombe. Malgré cela, rien n’est arrivé à Albrecht ou à son gouvernement. L’affaire embarrassante a été rapidement étouffée, et la mort de Debus n’est pas beaucoup plus qu’un nom sur la longue liste de ceux qui sont morts de faim au profit des Albrecht.

Ernst avec Ursula, en 1982
[Wolfgang Steche / Visum / picturedesk.com]

On ne sait toujours pas pourquoi Ernst Albrecht a perpétré cette attaque terroriste contre son propre pays, mais il est possible qu’elle soit liée à des rumeurs persistantes selon lesquelles la FAR cherchait à enlever sa fille bien-aimée Ursula en représailles des sympathies nazies qu’il avait. En raison de cela, lorsqu’Ursula s’est inscrite à la London School of Economics, elle l’a fait sous le nom d’emprunt de Rose Ladson afin de dissimuler son identité. Ce nom n’a pas été choisi au hasard. Il représente en fait le lien avec une autre époque pendant laquelle les « valeurs européennes » de la Maison Albrecht étaient imposées au monde.

La rose de Dixie

« L’instruction religieuse et morale des nègres est, depuis plusieurs années, un sujet qui m’intéresse beaucoup, et je suis convaincu que nos efforts en leur faveur (bien qu’il reste encore beaucoup, vraiment beaucoup, à faire) sont non seulement mal compris à l’étranger, mais aussi mal appréciés. Améliorer le nègre est une tâche beaucoup plus ardue que ne le savent ceux qui n’ont pas l’expérience de l’enseignement. Ils sont naturellement ternes et d’une intelligence faible, mais possèdent généralement une bonne mémoire ; et ceux qui se sont engagés dans cette œuvre de charité doivent déplorer, après beaucoup de travail, que l’instruction qu’ils se sont efforcés de donner, bien qu’on s’en souvienne, ait été pervertie et mal dirigée.

(James H. Ladson, L’instruction religieuse des nègres [1845])

Ursula a choisi son nom d’après une autre branche de sa famille, les Ladsons de Caroline du Sud. Les Ladsons étaient une famille de marchands d’esclaves, de propriétaires de plantations et de sécessionnistes. Bien qu’ils ne portent pas un titre aristocratique comme les Albrecht ou les von der Leyen, ils avaient tous les mêmes caractéristiques de l’aristocratie européenne. L’entreprise de coton d’Albrecht a permis à la famille d’entrer en contact étroit avec les Ladson, et la relation s’est développée jusqu’à ce que Mary Ladson-Robertson épouse en 1902 Carl Albrecht, unissant ainsi les deux maisons par le sang.

Les liens coloniaux de la famille Albrecht peuvent expliquer pourquoi elle était si à l’aise avec les nazis. Outre les parallèles évidents concernant l’asservissement et l’exploitation économique de races entières de personnes, la colonisation d’un continent, les hiérarchies raciales et le meurtre de masse à l’échelle industrielle, les nazis étaient d’ardents admirateurs du modèle colonial américain. Ils ont même spécifiquement basé leur propre système racial sur celui du Sud américain.

James Ladson, lieutenant-gouverneur de la Caroline du Sud, de 1792 à 1794

La famille Ladson a débuté sur le chemin de l’infamie à la Barbade lorsque John Ladson a immigré d’Angleterre au milieu des années 1600. En 1679, Ladson faisait partie des premiers colons de la nouvelle colonie de Caroline, où il a acheté une plantation à l’extérieur de Charleston que la ville englobait depuis longtemps. À l’époque, la Barbade était une escale importante pour le commerce des esclaves, et c’est là que les Ladson ont goûté pour la première fois au sang et à l’argent.

La Barbade a été la première société esclavagiste britannique. Cette belle île des Caraïbes a été impitoyablement exploitée pour ses richesses naturelles lorsqu’elle est passée sous contrôle britannique à partir de 1630. Les fréquents raids, les maladies et les politiques intentionnelles de génocide menées par les Espagnols avant eux avaient exterminé le peuple indigène des Arawak, laissant l’île prête à être repeuplée par des esclaves. Son climat chaud et son sol fertile étaient parfaits pour la culture du tabac, ainsi que et celle de la canne à sucre qui était ensuite distillée en rhum et vendue dans le monde entier.

En 1636, des lois ont été mises en œuvre pour garantir que tous les Africains amenés sur l’île et leurs descendants seraient des biens meubles permanents, sans possibilité d’être affranchis. En 1661, les codes de l’esclavage ont été renforcés, considérant tous les esclaves comme des biens immobiliers, vivants dans le seul but de créer de la valeur pour leurs propriétaires. Les esclaves étaient considérés comme des biens en premier lieu et des êtres humains seulement en second, voire pas du tout. Les règles existaient pour protéger la valeur des esclaves en tant que propriété, et non leur vie ou leur dignité.

De 1630 à 1807, quelque 380 000 Africains ont été enlevés de chez eux, enchaînés et envoyés à la Barbade pour y être exploités jusqu’à leur mort. Des milliers d’entre eux ont été vendus par les Ladson à des plantations dans tout l’hémisphère, et la mort et la souffrance ont rendu la famille extrêmement riche.

Les esclaves ont subi une brutalité inimaginable aux mains de maîtres comme les Ladson. De 1705 à 1735, le nombre d’entre eux qui ont été importés à la Barbade, en plus de ceux qui y étaient nés, était d’environ 85 000. Toutefois, en raison du taux de mortalité extrême sur l’île, la population totale n’a augmenté que de 4 000 personnes.

Les révoltes, le refus d’accepter le christianisme ou tout acte de défiance de la part des esclaves étaient réprimés avec un maximum de violence pour servir d’exemple. Cette torture et cette boucherie étaient si courantes que la plupart des cas n’ont jamais été enregistrés ; mais, pour certains, nous disposons de témoignages de première main. L’un d’entre eux est tiré du journal du Père Antoine Biet, un prêtre et missionnaire français en 1654 :

« Ils traitent leurs Esclaves Nègres avec beaucoup de rigueur. Si quelques-uns sortent le Dimanche hors les limites de leur plantation, ils sont chargés de cinquante bastonnades, desquelles ils sont quelquefois tout brisés. S’ils font quelque autre faute un peu considérable, ils les battent avec excès, jusqu’à leur appliquer quelquefois des tisons de feu à plusieurs endroits de leurs corps ; ce qui les fait crier comme des désespérés, ainsi que j’ai vu une pauvre femme Négresse, âgée peut-être de trente-cinq ou quarante ans, de laquelle le corps était plein de plaies qu’elle pensait, causées par l’application des tisons de feu que lui aurait faite son Maître ; cela me faisait horreur. Comme ces pauvres misérables sont très mal nourris, ils font quelquefois quelque échappée pendant la nuit, et vont dérober dans quelque plantation voisine quelque cochon et choses de semblables. Mais s’ils sont découverts, il n’y a point de pardon pour eux. J’allais un jour visiter mon Hybernois [Irlandais (NdT)]. Il y avait aux fers un de ces pauvres Nègres qui avait dérobé un cochon. Le Commandant le faisait battre d’escourgées tous les jours par les autres Nègres jusqu’à le mettre tout en sang, ayant toujours les fers aux mains. Le Commandant après l’avoir fait traiter ainsi sept ou huit jours, lui coupa une oreille, la fit rôtir, et lui fit manger par force. »

(Me Antoine Biet, Voyage de la France équinoxiale en l’île de Cayenne, entrepris par les Français en l’année 1652 [Livre second] [Paris, 1664])

[Transcription littérale de l’ancien français réalisée à partir de l’édition de 1664 (NdT)]

Représentation d’époque d’esclaves fouettés aux Antilles
[Album for the relief of British negro slaves (Benjamin Hudson, 1828) • The John Carter Brown Library]

Malgré cela, les esclaves n’ont jamais abandonné. Les actes de résistance allaient de l’utilisation de leur langue maternelle en privé à des arrêts de travail, des actes de sabotage et même des révoltes organisées. Malheureusement, les autorités britanniques disposaient d’une force de police importante et bien armée, et les forêts de la Barbade ayant été entièrement rasées pour faire place à la canne à sucre, les esclaves rebelles n’avaient aucun endroit où se cacher. Les révoltes ont toujours été écrasées, et les esclaves de la Barbade n’ont été libérés qu’en 1834, près de 200 ans après leur première rencontre avec les « valeurs européennes ».

En Caroline du Sud, les Ladson ont consolidé leur richesse et leur pouvoir, devenant finalement l’une des familles les plus influentes de l’État, avec des rapports profonds dans la finance, la politique et, bien sûr, l’esclavage. À l’instar des aristocrates d’Europe, les Ladson ont renforcé leur maison en se mariant avec d’autres familles d’élite, dont la plupart faisaient le commerce des esclaves. Parmi leurs ancêtres se trouvaient des hommes comme James Moore, l’ancien gouverneur de la Caroline qui a gagné sa position grâce à des raids génocidaires au cours desquels plus de 4 000 indigènes Appalaches ont été pris comme esclaves, ce qui a finalement conduit à l’extermination complète de la tribu.

Dans les années 1790, les Ladson ont pu s’assurer une place dans les plus hautes sphères du commerce d’esclaves grâce à un mariage avec la famille Wragg. Joseph Wragg était le marchand d’esclaves le plus productif et l’un des hommes les plus riches des Amériques. Il a débuté comme capitaine de navires négriers jusqu’à ce qu’il gagne suffisamment d’argent pour acheter son propre marché d’esclaves et une plantation près de Charleston. Entre 1717 et 1747, au moins 10 000 personnes ont été enlevées de chez elles, enchaînées et forcées de monter dans les cales sombres et surpeuplées de « Guinéens » pour être vendues comme biens meubles par Joseph Wragg et sa compagnie sur le quai de Wraggborogh, en Caroline du Sud.

Un bateau de « Guinéens » bien chargé
[Robert Walsh, Notices of Brazil in 1828 and 1829 (London, 1830) • Slavery Images]

On estime que deux millions d’esclaves ont péri dans ce que l’on appelle le commerce triangulaire, de la Grande-Bretagne vers l’Afrique, vers les Amériques et retour en Grande-Bretagne. Les esclaves étant considérés comme des biens avant tout, tout était fait pour maximiser les profits, même au prix de vies humaines. Afin d’optimiser l’espace, les esclaves étaient entassés aussi serrés que possible, ce qui entraînait souvent d’horribles épidémies et même des cas de suffocation.

Ursula von der Leyen : « “Pourquoi les régimes autoritaires ont-ils si peur de l’Europe ? Nous ne faisons pas la guerre, nous n’imposons pas notre modèle. Alors pourquoi ? Ce sont nos valeurs qui leur font peur.”
La question de David Sassoli ressemble aujourd’hui à une prophétie.
Un an après sa disparition, le souvenir de David réchauffe encore nos cœurs et nous montre le chemin. »

« Tout en exprimant mon horreur de ce que je voyais et en m’exclamant contre l’état de ce vaisseau pour le transport des êtres humains, je fus informé par mes amis, qui avaient passé tant de temps sur la côte d’Afrique et visité tant de navires, que c’était un des meilleurs qu’ils eussent vus. La hauteur qui sépare parfois les ponts n’est que de dix-huit pouces [45,72 cm (NdT)], de sorte que les malheureux ne peuvent se retourner ni même se mettre sur le côté, l’élévation étant inférieure à la largeur de leurs épaules ; et ici ils sont ordinairement enchaînés aux ponts par le cou et les jambes. Dans un tel endroit, le sentiment de misère et de suffocation est si grand que les Nègres, comme les Anglais dans le Trou Noir de Calcutta, sont poussés à la frénésie. Ils avaient un jour pris un navire négrier dans la rivière Bonny ; les esclaves étaient rangés dans l’espace étroit entre les ponts et enchaînés les uns aux autres. Ils entendirent un vacarme et un tumulte horribles parmi eux et ne purent imaginer de quelle cause ils provenaient. Ils ouvrirent les écoutilles et les firent monter sur le pont. Ils étaient enchaînés les uns aux autres par deux et par trois. On peut imaginer leur horreur lorsqu’ils en trouvèrent un certain nombre à différents stades de suffocation ; beaucoup d’entre eux avaient l’écume aux lèvres et étaient à l’agonie — beaucoup étaient morts. Parfois, un homme vivant était traîné vers le haut, et son compagnon était un cadavre ; parfois, sur les trois attachés à la même chaîne, un était mourant et un autre mort. Le tumulte qu’ils avaient entendu était la frénésie de ces malheureux suffocants, au dernier stade de la fureur et du désespoir, luttant pour se dégager. Quand ils furent tous remontés, dix-neuf étaient irrémédiablement morts. Beaucoup se sont entretués dans l’espoir de trouver un espace pour respirer ; des hommes ont étranglé leurs voisins et des femmes se sont enfoncé des clous dans le cerveau. En d’autres occasions, nombre de ces créatures malheureuses ont saisi la première opportunité de sauter par-dessus bord et de se débarrasser, de cette manière, d’une vie intolérable. »

(Révérend Robert Walsh, Notes du Brésil en 1828 et 1829 — Vol. II [Londres, 1830], p. 485-486)

Les Ladson étaient également actifs pour imposer les « valeurs européennes » à leurs victimes. En particulier, James H. Ladson (il y a plusieurs James Henry Ladson dans cette famille, mais aucun d’entre eux n’a reçu de suffixe pour les distinguer ; par souci de clarté, je me référerai à cette personne en tant que James H. Ladson) était connu pour avoir construit une immense chapelle sur l’une de ses plantations où il pouvait imposer les « valeurs européennes » à ses esclaves par le biais d’une conversion forcée. Cette attitude était typique du Sud où la suprématie blanche revêtait un caractère paternaliste. Les maîtres d’esclaves se considéraient comme des personnes nobles et charitables, apportant la « civilisation » aux Noirs sauvages qu’ils brutalisaient pour de l’argent. La civilisation, tout comme « le sang et le sol » et les « valeurs européennes », n’était rien d’autre qu’un euphémisme sanglant.

Le journal local a bel et bien qualifié James H. Ladson d’« excellent exemple du gentleman de Caroline d’autrefois, au caractère pur et au rapport avec les personnes des plus édifiant et enrichissant, et il a été pendant de nombreuses années à la tête de la maison James H. Ladson & Co, aujourd’hui représentée par la société W.C. Bee & Co. Celle-ci a exercé une activité importante et lucrative en tant que négociante de riz et de coton. Il était également directeur de banque et, pendant la majeure partie de sa vie, un membre éminent de l’église épiscopale St Michael de notre ville, où il s’est distingué par ses vertus chrétiennes et sa bienveillance constante ».

Cet excellent gentleman du Sud était également un fervent partisan de la cause des « droits des États », un autre euphémisme sanglant, pour laquelle les Ladson étaient prêts à tuer. La vérité sur les « droits des États » a été révélée par les propres actions de Ladson : il a travaillé sans relâche pour la cause de la Confédération, et il était tout à fait clair qu’il le faisait pour protéger ses intérêts économiques.

Au total, 620 000 personnes sont mortes pour les intérêts économiques de James H. Ladson, y compris son propre fils, et un million d’autres ont été blessées, dont beaucoup ont été mutilées à vie. Pour cela, il n’a subi aucune conséquence et a gardé chaque centime et tout le prestige gagnés grâce au sang et à la souffrance des esclaves et des soldats.

Chaque rose a ses épines

« Elle a une profonde culture européenne, elle est née à Bruxelles et est la fille d’un fonctionnaire bruxellois, donc je peux dire qu’elle a l’ADN de l’union en elle. »

(Emmanuel Macron, Bloomberg, juillet 2019)

Il n’est pas du tout injustifié de se demander d’où viennent l’argent et le pouvoir de la famille d’Ursula von der Leyen, et ce qu’ils ont fait pour les gagner, d’autant plus qu’Ursula a énormément profité de la richesse et des relations de sa famille pour faire avancer sa propre carrière, qui peut être considérée comme un exemple de corruption, de scandale grave, d’incompétence et, peut-être même, de trahison pure et simple. Son passage en politique montre que la pomme d’Ursula n’est pas tombée loin de l’arbre généalogique des Albrecht.5

Lutz von der Heide

Ursula von der Leyen est entrée en politique en 2003, lorsqu’elle a été battue par Lutz von der Heide, un pilier de la CDU, lors d’une élection primaire régionale à Hanovre. Cette défaite était inacceptable pour Ernst Albrecht, son père, qui a lancé une campagne de pression aux côtés de son ancien adjoint et officier d’artillerie de la Wehrmacht, Wilfried Hasselmann.

Les deux hommes se sont mis au travail, faisant campagne pour Ursula et dénigrant son adversaire, qui occupait le siège depuis plus de 15 ans. À l’époque, Ursula von der Leyen avait une chronique de longue date dans le tabloïd d’extrême droite Bild, un journal fondé par l’ex-propagandiste nazi et agent de la CIA Axel Springer, qui a été sanctionné des dizaines de fois pour des violations de la loi allemande ; grâce à cela, elle a pu amplifier efficacement les attaques contre von der Heide. Bientôt, toute l’Allemagne pouvait lire les dernières saletés concernant une primaire pour une petite élection régionale.

Axel Springer

La campagne a été décisive et, au deuxième tour de scrutin, Ursula von der Leyen l’a emporté par une majorité des deux tiers. Il s’agissait d’un siège sûr et la candidate a été facilement élue. Dans ces conditions, il est impossible de séparer Ursula de l’héritage de son père.

Deux ans plus tard, elle a été choisie par Angela Merkel pour occuper le poste de ministre du Travail et de la Famille, malgré son expérience politique quasi inexistante. À ce poste, elle s’est surtout fait remarquer en réduisant les services sociaux pour les personnes aveugles et en essayant d’interdire les albums de heavy métal, un CV qui ne semble pas justifier de promotion supplémentaire.

Malgré cela, elle a été nommée ministre de la Défense en 2013, une décision qui a déconcerté l’opposition. C’est là que ses « valeurs européennes » ont commencé à se manifester une fois de plus.

Le mandat d’Ursula von der Leyen consistait à développer et à améliorer la préparation de la Bundeswehr (Force de Défense fédérale), et elle s’est attelée à la tâche avec enthousiasme. Elle a commencé à battre le tambour pour la guerre, arguant que l’armée allemande était trop petite et mal préparée pour faire face à n’importe quel nouvel ennemi qu’elle imaginait ce jour-là. Qu’il s’agisse de l’Afghanistan, de l’Iran, de la Chine, de la Russie ou de la Syrie, elle ne cessait de réclamer plus d’armes, plus de guerres et plus d’argent. Elle a même proposé de créer une Légion étrangère allemande pour renforcer les rangs de la Bundeswehr, une proposition qui a été accueillie avec horreur et condamnation de toutes parts.

Ursula von der Leyen, alors ministre de la Défense allemande, pose avec les forces spéciales allemandes lors de la visite de la Bundeswehr à Kiel en Allemagne, le 21 avril 2017.
[Fabian Bimmer / Reuters]

Presque immédiatement, elle a déclaré que le ministère avait besoin d’une aide extérieure et a engagé l’un des consultants favoris et les plus criminels de la classe politique néolibérale, McKinsey, affilié à la CIA, qui a déjà accueilli des lumières telles que Susan Rice, Chelsea Clinton, Pete Buttigieg et bien d’autres politiciens et dirigeants d’entreprise à la réputation douteuse. Les ramifications de McKinsey s’étendent aux gouvernements et aux entreprises du monde entier et illustrent la « porte tournante » entre le gouvernement, les services de renseignement et les grandes entreprises.

C’était plus qu’un simple cabinet de conseil : McKinsey a reçu le contrôle direct du ministère au sein duquel la consultante Katrin Suder a pu, de ce fait, obtenir un nouveau poste pour « réformer le secteur de l’armement ». Ursula von der Leyen a versé près d’un demi-milliard d’euros dans les coffres de McKinsey et autres pour des services de « conseil », et n’a absolument rien reçu en retour. La non-élue Suder a été vue si souvent aux côtés de von der Leyen que l’opposition a plaisanté en disant qu’elle était son nouveau garde du corps.

Katrin Suder (à gauche) avec Ursula von der Leyen
[Bernd von Jutrczenka / Picture Alliance]

Cette corruption éhontée, connue sous le nom de l’« affaire des consultants », était si grave qu’elle a donné lieu à une enquête parlementaire, l’opposition de gauche comme de droite exigeant des réponses de la part de von der Leyen. Celle-ci a réagi en faisant de l’obstruction, en refusant tout simplement de répondre aux questions ou de fournir des informations, et en détruisant finalement les preuves de ses méfaits avant qu’elle ne puisse être présentée au Parlement. En l’absence de ces preuves, l’enquête a échoué. Pour son rôle dans l’affaire, Katrin Suder s’est vu décerner la Croix d’honneur de la Bundeswehr par von der Leyen.

Le scandale était si grave, si effronté et si déconcertant que le Parti social-démocrate (Sozialdemokratische Partei Deutschlands / SPD) d’opposition a ouvertement accusé Ursula von der Leyen de trahison, travaillant dans l’intérêt du gouvernement des États-Unis et non de l’Allemagne :

« En tant que ministre fédérale de la Défense, von der Leyen s’est comportée comme le souhaitait le président des États-Unis lorsqu’il a appelé à la hausse des dépenses militaires : augmentation des dépenses militaires, réarmement au lieu du désarmement. Et bien que cette ministre ait eu des ennuis à cause de ses dépenses élevées dans des cabinets de conseil et de diverses décisions concernant son personnel, et bien qu’elle ait été tout sauf un modèle, elle est devenue présidente de la Commission européenne. C’est une fonction clé et c’est important pour les États-Unis.

La décision concernant von der Leyen s’est faite discrètement dans les coulisses. Aucune personne sensée ne peut expliquer pourquoi on lui a confié ce poste important. Une explication partielle révélatrice : elle avait le soutien d’importants pays d’Europe de l’Est. Les États-Unis ont une grande influence sur ces États.

Dans le premier cas critique majeur, von der Leyen a immédiatement et sans équivoque représenté la position des États-Unis : l’Iran lui-même serait à blâmer pour la confrontation au Moyen-Orient et pour l’exécution du général iranien. Avec elle, les États-Unis peuvent probablement aussi faire valoir leur position à d’autres occasions et jouer un rôle clé dans le façonnement de la structure interne de l’Union européenne. Ursula von der Leyen est l’exemple parfait d’un “agent d’influence”. »

(Albrecht Müller, député du SPD, 2 janvier 2021, traduit de l’allemand)

La Bundeswehr d’Ursula était plus qu’une simple collecte de fonds pour une classe de consultants parasites. C’était aussi un incubateur pour la même idéologie infâme que son père a passé la vie à promouvoir. Sous la direction de von der Leyen, les sympathies d’extrême droite et néonazies ont explosé dans les rangs de la Bundeswehr.

Malgré les avertissements répétés émanant de l’intérieur et de l’extérieur de l’armée, von der Leyen n’a rien fait de substantiel. Ses consultants McKinsey ont créé des cours de sensibilisation pour l’armée, et von der Leyen a fait des tournées publicitaires constantes sur les bases militaires, mais le problème a continué à s’aggraver. Finalement, en 2018, un complot a été découvert au sein de l’Unité des forces spéciales (Kommando Spezialkräfte / KSK) pour assassiner des politiciens allemands et renverser le gouvernement allemand.

Ursula rend visite aux troupes à la caserne du Maréchal Rommel, anciennement connue sous le nom de terrain d’entraînement de Sennelager pour les SS et les Jeunesses hitlériennes.
[Dirk Vorderstraße]

Des enquêtes complémentaires menées en 2019 ont révélé que la KSK était non seulement infestée de néonazis déclarés, mais que ces derniers projetaient activement de renverser le gouvernement allemand depuis au moins trois ans. En outre, bien qu’ils aient été avertis à plusieurs reprises, Ursula von der Leyen et son armée de consultants n’avaient au mieux rien fait et au pire activement exacerbé le problème.

Une descente de police a permis de découvrir des caches d’armes, d’explosifs et de souvenirs nazis. De plus, des inspections ont révélé que 48 000 munitions et environ 135 livres d’explosifs plastiques manquaient à l’appel, laissant de nombreux politiciens allemands se demander combien d’autres cellules terroristes existaient au sein de la Bundeswehr. Les munitions et explosifs manquants n’ont jamais été retrouvés. En fin de compte, le ministère de la Défense n’a eu d’autre choix que de dissoudre entièrement la KSK.

Malgré tout cela, Ursula von der Leyen était considérée comme une favorite pour succéder à Jens Stoltenberg au poste de secrétaire général de l’OTAN. Compte tenu de l’histoire de l’Alliance avec les nazis, il n’est pas surprenant que ses liens avec l’extrême droite aient été ignorés ou, plus probablement, aient joué en sa faveur.

Jens Stoltenberg, le ministre britannique de la Défense Michael Fallon, le secrétaire à la Défense des États-Unis Ash Carter et Ursula von der Leyen à Bruxelles, en octobre 2015
[Sgt. 1st Class Clydell Kinchen, U.S. Army]

La raison pour laquelle Ursula von der Leyen n’a pas été choisie est qu’elle avait une fois de plus échoué dans son ascension et avait déjà été élue présidente de la Commission européenne lors d’une élection serrée qu’elle a remportée malgré la condamnation quasi universelle des politiciens allemands, tant de son propre parti que de l’opposition. Angela Merkel, patronne et amie proche, a dû s’abstenir de voter après que le Parlement allemand a refusé de nommer von der Leyen.

La décision a toutefois été saluée par des hommes politiques étrangers tels qu’Emmanuel Macron, qui a publié une déclaration risible dans laquelle il a déclaré : « J’ai vu sa capacité à faire avancer les choses et à ne pas être captive d’intérêts particuliers », à propos d’une dirigeante qui, quelques mois auparavant, avait été accusée de trahison pour sa soumission totale aux intérêts particuliers étrangers. Bloomberg a qualifié de « réformatrice dure et visionnaire » la femme qui a passé près de cinq ans à créer de nouveaux postes ministériels pour ses amis et, au mieux, à ignorer, sinon à couver activement, un second putsch de la Brasserie.6

Walter Hallstein

Ursula von der Leyen est la première femme à occuper ce poste, et la deuxième à avoir quelque lien que ce soit avec les nazis : l’ancien officier d’artillerie de la Wehrmacht et professeur de droit, le nazi Walter Hallstein, avait fait ses débuts en politique en défendant les vertus des lois raciales de Nuremberg lorsqu’il était jeune homme, démontrant ainsi son engagement de toujours pour les « valeurs européennes ».

C’est depuis sa nouvelle plateforme à Bruxelles que le monde entier a pu voir les « valeurs européennes » d’Ursula von der Leyen. Après le déclenchement de la guerre en Ukraine, la présidente de la Commission européenne a dominé l’actualité en tant que l’un des défenseurs les plus énergiques et les plus inébranlables en faveur de plus de guerre, de plus de sanctions et de plus d’armes.

Ursula von der Leyen a même fait une tournée en Ukraine, s’arrêtant pour une séance de photos désormais célèbre dans la ville de Boutcha récemment reconquise, où elle a versé des larmes de crocodile pour les victimes d’un massacre dont nous sommes censés croire qu’il a été perpétré par les forces russes en bombardant leurs propres positions, mais qui en réalité a été presque certainement causé par l’artillerie ukrainienne.

Ursula von der Leyen à Boutcha, versant des larmes de crocodile
[Ukrainian Prime Minister Denys Shmyhal on Telegram]

Il s’avère qu’Ursula a également des liens familiaux dans cette région. La dernière fois qu’un von der Leyen était en Ukraine, un parent éloigné, Joachim, y apportait les « valeurs européennes » comme Gaultier, le nazi de Galicie. Dans le cadre de ce que les nazis ont appelé l’opération Reinhard, la région a été rendue « libre des Juifs » (« Juden Frei ») grâce aux efforts diligents des nationalistes ukrainiens, qui ont servi de punisseurs pour le régime nazi, pour ensuite échapper au châtiment grâce aux efforts des États-Unis et de l’OTAN.

Aujourd’hui, un descendant de Joachim se tient une fois de plus aux côtés des nationalistes, apportant la mort et la dévastation au peuple ukrainien et au monde entier. Combien d’autres devront mourir cette fois pour les « valeurs européennes » d’Ursula von der Leyen ?

Sources :


Sources des photographies et illustrations dans le texte :
Se référer aux mentions et hyperliens associés.
[ Public domain • Creative commons • Fair use ]


Source de la photographie d’en-tête : Dati Bendo
European Union / EC - Audiovisual Service
Visit of Ursula von der Leyen, President of the European Commission, to Ukraine
Ursula von der Leyen et Volodymyr Zelensky, 2 février 2023
https://audiovisual.ec.europa.eu/en/photo/P-060090~2F00-09
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:P060090-356327.jpg


  1. Rote Armee Fraktion (RAF) (NdT) 

  2. « Schéma directeur pour l’Est », projet nazi d’aménagement territorial en Europe centrale et orientale selon des critères raciaux (NdT) 

  3. Uninsightful, dans le texte original en anglais (NdT) 

  4. Insightful, dans le texte original en anglais (NdT) 

  5. Allusion au proverbe « The apple doesn’t fall far from the tree » (« La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre »), équivalent à « Les chiens ne font pas des chats » ou « Tel père, tel fils » (NdT) 

  6. Le putsch de la Brasserie, ou putsch de Munich, est une tentative de prise du pouvoir par la force en Bavière menée par Adolf Hitler, dirigeant du Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP), dans la soirée du 8 novembre 1923. (NdT) 

 

Paramétrage
 Aspect :
Blanc Blanc antique
Noir Gris ardoise foncé