Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais |
D’une manière ou d’une autre, le massacre de Gaza prendra fin un jour. Mais, les forces qui nous habitent et qui sont à l’origine de cette boucherie perdureront longtemps après que le bruit des drones et des explosions aura cessé.
Certains jours, il est difficile de dire ce qui est le plus horrible : le génocide de Gaza lui-même ou la décadence morale de notre société qui le rend possible.
Je veux dire par là que les atrocités commises à Gaza ont fait quelque deux millions de victimes. Si l’on totalise les populations des États-Unis, de l’Europe, du Canada et de l’Australie, on obtient environ un milliard de personnes vivant dans une dystopie et dont la conscience collective est à ce point tordue qu’elles autoriseraient leurs gouvernements à soutenir un génocide diffusé en direct au vu et au su du monde entier. Un milliard de personnes dont la faillite morale est telle, qu’elles trouvent tolérable qu’un tel cauchemar soit infligé à leurs semblables sous leurs yeux.
Ce phénomène est apparu clairement dans le feu de l’action, lors de la course à la présidence des États-Unis : des dizaines de millions d’électeurs se sont empressés de balayer Gaza du revers de la main afin de pouvoir soutenir l’un des deux principaux candidats qui se sont tous deux engagés à soutenir l’État sioniste responsable du génocide. Au mieux, ils considèrent les crimes d’Israël comme une question secondaire ennuyeuse, à propos de laquelle la gauche ne cesse de perturber leurs soirées Kamala ; et au pire, ils soutiennent totalement les actions d’Israël.
Quelle façon de vivre futile, dépourvue de sens et d’âme. Quelle trahison de la vérité et de notre propre humanité. Comment peut-on trouver de la satisfaction dans ce genre d’existence de zombie ? En se laissant aller sans réfléchir au rythme du statu quo, en dévorant de la chair humaine parce que c’est plus confortable que la dissonance cognitive qui résulterait du divorce avec la vision du monde qui sert le pouvoir, cette vision avec laquelle on nous a endoctriné dès la naissance…
J’écoutais l’interview d’un médecin qui a travaillé à Gaza pendant le génocide et il a parlé de la fois où, il y a plusieurs mois, Tsahal a forcé l’évacuation d’un hôpital et a laissé mourir quatre bébés prématurés dans leurs couveuses après avoir assuré au personnel qu’on s’occuperait d’eux. Leurs petits corps ont été retrouvés en état de décomposition des semaines plus tard, après que les forces israéliennes ont évacué la zone.
Comment cet incident, à lui seul, n’a-t-il pas stoppé le monde ? Comment n’a-t-il pas stoppé notre élan et ne nous a-t-il pas obligés à réévaluer tout ce qui nous avait conduits jusqu’ici ? La mort de ces quatre bébés n’était pas un secret ; c’était dans les journaux grand public. C’était là, sous nos yeux, et nous n’avons rien fait.
De telles atrocités se produisent quotidiennement depuis treize mois maintenant, et toujours rien.
Nous sommes obligés de vivre comme ça. Nous sommes obligés de vivre dans cette dystopie génocidaire, entourés de somnambules couverts de sang humain. Nos vies ici en Occident sont beaucoup, beaucoup plus confortables que celles des habitants de Gaza, mais elles sont aussi bien moins authentiques et bien moins aptes à nourrir l’esprit humain.
Nous marinons dans le mensonge et la psychopathie, nous regardons le mensonge et la psychopathie, nous mangeons, buvons, dormons et respirons le mensonge et la psychopathie. Nos esprits sont pleins d’ordures et nos cœurs sont pleins de merde, et nous pataugeons jusqu’aux chevilles dans le sang, la sueur et les larmes du Sud. Cette plaie suppurante de la civilisation est le seul terreau dans lequel le génocide soutenu par l’Occident à Gaza peut prendre racine.
Les habitants de Gaza doivent subir les conséquences de qui nous sommes et de ce que nous sommes devenus ; mais nous, nous devons vivre avec qui nous sommes et ce que nous sommes devenus. Nous tuons leurs bébés et les laissons pourrir, mais c’est nous qui devons vivre avec les cadavres de bébés en décomposition dans nos âmes.
D’une manière ou d’une autre, le massacre de Gaza prendra fin un jour. Mais, les forces qui nous habitent et qui sont à l’origine de cette boucherie perdureront longtemps après que le bruit des drones et des explosions aura cessé.
Nous devrons vivre ainsi. Nous devrons vivre en sachant que ça, c’est ce que nous sommes.
Sources :
Source de la photographie d’en-tête : فارس نوجوان (Fars News)
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