Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais |
Dans son plaidoyer historique contre « le massacre en cours de la population de Gaza », l’Afrique du Sud a commencé sa présentation à La Haye avec ce que les experts des droits de l’homme ont considéré comme des preuves « horribles » et « dévastatrices » de l’intention génocidaire d’Israël dans « une campagne militaire exceptionnellement brutale » : de la mort de nombreux civils, principalement des femmes et des enfants, à la destruction massive des infrastructures, en passant par la famine qui menace. Un rappel macabre : pendant qu’ils parlaient, et aujourd’hui, et demain, les atrocités — soutenues par le financement des États-Unis — se poursuivent en toute impunité.
Avec des arguments « convaincants et présentés avec force », les juristes sud-africains de la Cour internationale de justice (CIJ) ont montré ce que Jeremy Corbyn du Royaume-Uni a qualifié d’« horreur après horreur, exposée à la vue de tous » ; leur dossier accuse Israël de violer la Convention historique sur le génocide… convention adoptée de manière incongrue l’année même de la naissance d’Israël par le biais du nettoyage ethnique des Palestiniens. Cherchant à obtenir une ordonnance d’urgence pour mettre fin à l’assaut sauvage lancé depuis trois mois par Israël contre la bande de Gaza, l’Afrique du Sud a présenté, dans le dossier de 84 pages, la description détaillée d’un « cas d’école de génocide », c’est-à-dire d’actes visant à « détruire [un] groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Dans un tel cas, l’intention est cruciale ; par chance, l’audace des dirigeants israéliens déterminés à se venger a été pleinement exposée, de manière accablante. « Laissons les mots du Premier ministre parler d’eux-mêmes », a proposé l’avocat Tembeka Ngcukaitobi qui a cité neuf pages de déclarations génocidaires de la part de responsables israéliens, depuis le vœu d’un membre de la Knesset de « réduire Gaza en cendres » jusqu’à la phrase de Netanyahou : « Souvenez-vous de ce qu’Amalek vous a fait — n’épargnez personne ». En conséquence, « les preuves de l’intention génocidaire [sont] accablantes et incontestables ».
Les avocats ont également noté qu’une fois que les responsables israéliens ont « systématiquement et explicitement déclaré leur intention génocidaire », leurs objectifs ont inévitablement été repris par les soldats sur le terrain ; la preuve de ce cycle meurtrier comprend une vidéo troublante de soldats de Tsahal à Gaza dansant et scandant qu’il n’y a « pas de civils non impliqués ». « Quel État reconnaîtrait une intention génocidaire ? », a demandé pour la forme un juriste. « Pourtant, le trait distinctif de cette affaire n’est pas le silence, mais la réitération et la répétition d’un discours génocidaire. » Jeremy Scahill note qu’au moins une partie de l’audace sans vergogne et sanguinaire d’Israël découle d’un sentiment d’invincibilité né de décennies de complicité bien financée par des États-Unis dont ils savent qu’ils les mettront à l’abri de toute obligation de rendre des comptes. « L’Afrique du Sud a présenté un dossier méticuleux qui détaille les intentions génocidaires d’Israël », écrit-il. « Les États-Unis ont tout soutenu. » Compte tenu de leur rôle en tant que « suzerain ultime » des abus israéliens — et de leur « rituel macabre » consistant à feindre le chagrin pour la mort d’enfants tout en contournant le Congrès pour l’accélérer —, il n’est pas surprenant, bien que choquant, d’entendre ce putain d’Anthony Blinken rejeter allègrement l’accusation de génocide israélien, documentée de façon exhaustive, en la qualifiant d’« infondée ». Nous sommes restés muets de rage.
Oxfam estime qu’Israël tue 250 Palestiniens par jour, dont 48 mères et 118 enfants, souvent réduits en morceaux ; les plus de 90 000 morts, blessés et disparus de Gaza en font le conflit le plus meurtrier du siècle. Lors de sa plaidoirie déchirante à La Haye, l’avocate irlandaise Blinne Ní Ghrálaigh a présenté des faits encore plus graves : « Des familles entières et multigénérationnelles anéanties », « d’immenses pans de Gaza rayés de la carte », la mort quotidienne d’au moins trois médecins, deux enseignants, un journaliste et un travailleur des Nations unies et, tous les deux jours, un secouriste qui a passé des mois à extraire à mains nues des morts ou des blessés des décombres. Chaque jour, 10 enfants seront amputés d’une ou des deux jambes, souvent sans anesthésie ; d’autres encore mériteront l’acronyme WCNSF — Wounded Child, No Surviving Family (enfant blessé, sans famille survivante). Ní Ghrálaigh a terminé son discours avec deux photos d’un tableau blanc d’un hôpital de Gaza que les travailleurs de la santé, inondés de blessés au début de la guerre, avaient effacé des opérations chirurgicales déjà programmées. La première image montre un message écrit par le Dr Mahmoud Abu Nujaila de Médecin sans frontières (MSF) : « Nous avons fait ce que nous pouvions. Souvenez-vous de nous. » La seconde montre le tableau brisé par une frappe israélienne qui a tué Abu Nujaila et deux autres médecins.
Et cela continue. Le Council on American–Islamic Relations (CAIR) documente régulièrement les « crimes de guerre du jour » commis par Israël : les exécutions sommaires de Palestiniens non armés devant leurs familles, le bombardement de l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa qui a tué ou blessé 40 personnes, la destruction au bulldozer des corps dans les cimetières et des tentes médicales avec des Palestiniens blessés à l’intérieur, l’assassinat de quatre membres d’une équipe d’ambulanciers du Croissant-Rouge à Deir al-Balah, les exécutions ciblées d’au moins 77 journalistes , dont Hamza Dahdouh, 27 ans, fils de Wael Dahdouh, chef du bureau d’Al Jazeera à Gaza, qui a perdu maintenant cinq membres de sa famille. Wael pleure Hamza : « Il était l’âme de mon âme ». Des centaines d’autres civils gazaouis ont été détenus dans des « camps de torture » israéliens pour le « crime » de ne pas avoir quitté leurs maisons, que les soldats ont ensuite brûlées. Dans des interviews, les personnes libérées disent avoir été battues, cognées, avoir reçu des crachats, des décharges électriques, avoir été brûlées avec des cigarettes, attachées à des clôtures avec des menottes et un bandeau sur les yeux, avoir été privées de nourriture, d’eau et de toilettes, avoir été « traitées comme des poulets ou des moutons », et avoir été « torturées tout au long de la journée ». Lorsqu’ils implorent les soldats de Tsahal et leur disent qu’ils sont des civils innocents, ils s’entendent répondre : « Vous êtes du Hamas. Tous ceux qui restent à Gaza sont des membres du Hamas. »
Depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre, les arrestations massives, les raids militaires et les assassinats se sont multipliés également en Cisjordanie occupée, où au moins 340 Palestiniens ont trouvé la mort. Cette semaine, les forces israéliennes ont pris d’assaut le camp de réfugiés de Tulkarem, tirant sans discernement sur les zones résidentielles, au point qu’un combattant palestinien a qualifié ces tirs nourris de « délire — ils assassinent des innocents ». Après que les soldats de Tsahal ont encerclé la maison de la famille Al-Kholi, la vidéo montre un long et puissant tir de barrage alors que six jeunes hommes tentent de s’enfuir. Trois d’entre eux sont rattrapés et abattus : Yousef Ali Al-Kholi, 22 ans, Ahed Mousa, 23 ans, et Tareq Shahin, 24 ans. Un soldat continue de tirer sur un corps qui bouge encore ; puis, une jeep écrase un autre corps. Les proches ont qualifié ces morts d’« assassinats ». « Les soldats auraient pu simplement les encercler et les arrêter », a déclaré la tante d’Al-Kholi. « L’occupation tue toujours. » Ahmad, le cousin d’Al-Kholi âgé de 12 ans, a déclaré qu’il s’était caché à proximité ; il pouvait entendre Yousef crier, mais « les soldats étaient partout ». Une fois qu’ils sont partis, Ahmad s’est approché du corps, a enlevé le bandeau que Yousef lui avait donné et l’a trempé dans son sang « parce que c’est mon cousin. Je l’aime. Je l’aime autant que la mer ». Alors oui, il se souviendra de lui.
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