• Langue originale : français |
« Après avoir dominé le monde pendant deux siècles, l’Occident stupéfait réalise qu’il va falloir passer la main. »
Entretien de Bruno Guigue avec une journaliste indépendante
1. Les commentateurs occidentaux pointent la crise immobilière frappant actuellement la Chine, et ses conséquences sur la croissance à court et à moyen terme dans le pays. Pouvez-vous nous éclairer sur les origines de cette crise ainsi que sa dimension réelle, et sur les perspectives de croissance de l’économie chinoise ?
B.G. : Ce n’est pas un sujet nouveau, et il faut bien voir que la crise actuelle a pour origine un boom immobilier sans précédent. Dans la foulée des grandes réformes structurelles, la loi de 1998 a permis la création d’un véritable marché immobilier.
Le revenu des ménages progressant à un rythme impressionnant, ils se sont empressés d’acheter un logement, car pour les jeunes Chinois cette acquisition est un préalable au mariage. En 2017, une étude de HSBC montre que 70 % des jeunes ménages sont propriétaires de leur habitation, soit une proportion beaucoup plus élevée qu’en France (40 %).
N’oublions pas non plus qu’en vingt ans 300 millions de Chinois sont venus s’installer dans les villes.
Toutes les conditions étaient réunies pour une envolée spectaculaire de l’immobilier : une libéralisation du secteur, une très forte croissance de l’économie et une demande gigantesque servie par une épargne considérable.
Mais qui dit croissance très forte dit risque spéculatif, d’où la formation d’une bulle immobilière qui a fini par éclater.
Pour y faire face, le gouvernement chinois a annoncé plusieurs mesures : la création d’un fonds public pour soutenir le secteur, l’aide aux accédants en difficulté et la construction massive de logements sociaux.
À ses yeux, l’essentiel est d’assainir le marché sans léser les petits propriétaires. De toute façon, la transition vers un régime de croissance raisonnable fait partie des objectifs gouvernementaux, et cette transition passera par un surcroît de régulation étatique.
2. Depuis l’adoption de la politique de réforme et d’ouverture économique au début des années 1980, la Chine a connu un développement économique tel que la croissance du niveau de vie de ses habitants est spectaculaire. Quelles sont les grandes étapes de ce progrès ? Quels sont les chiffres clés ?
B.G. : En réalité, c’est depuis l’époque maoïste que le pays connaît une forte croissance, même si elle s’est accélérée dans les années 2000. En 1949 le pays était d’une pauvreté inouïe. Ravagés par la guerre et l’anarchie, les équipements étaient dans un état lamentable. La population avait le niveau de vie le plus faible de la planète, l’espérance de vie était de 36 ans, et 85 % des Chinois ne savaient ni lire ni écrire.
C’est au regard de cet état initial qu’il faut juger des progrès accomplis. En 2022, l’économie chinoise représente 18 % du PIB mondial en parité de pouvoir d’achat et elle a dépassé l’économie américaine en 2014. La Chine est la première puissance exportatrice mondiale. Son industrie représente le double de celle des États-Unis et quatre fois celle du Japon.
Premier partenaire commercial de 130 pays, elle a contribué à 30 % de la croissance mondiale au cours des dix dernières années. Avec 400 millions de personnes, les classes moyennes chinoises sont les plus importantes du monde, et 150 millions de Chinois sont partis en vacances à l’étranger en 2019.
Ce développement économique a amélioré les conditions d’existence matérielle des Chinois de façon spectaculaire.
L’espérance de vie est passée de 36 à 64 ans sous Mao (de 1949 à 1976) et elle atteint aujourd’hui 78,3 ans, soit plus que les USA (76,1) et nettement plus que l’Inde (70,1). L’analphabétisme et la malnutrition sont éradiqués. Le taux de scolarisation est de 98,9 % dans le primaire et de 94,1 % dans le secondaire. Selon l’étude comparative des systèmes éducatifs (PISA), la République populaire de Chine est numéro un mondial en 2019.
Encore plus significatif, le taux de grande pauvreté, selon la Banque mondiale, est passé de 95 % en 1980 à 17 % en 2010 et à 3,1 % en 2017. Il est nul en 2021. En vingt ans, 700 millions de personnes ont été extraites de la pauvreté. Le salaire moyen n’a cessé d’augmenter, et les entreprises étrangères ont commencé à délocaliser leur activité à la recherche d’une main-d’œuvre moins coûteuse.
3. Quels sont les principaux outils mis en œuvre depuis quatre décennies ? En quoi se comparent-ils à ceux qui sous-tendent la planification et l’aménagement du territoire en France sous le Général de Gaulle ? Les économistes chinois ont-ils analysé les méthodes françaises de l’époque ?
B.G. : Ce développement spectaculaire est le résultat d’efforts titanesques. Pour conduire le développement du pays, les communistes chinois ont bâti une économie mixte pilotée par un État fort.
Son objectif prioritaire est la croissance, appuyée sur la modernisation des entreprises publiques dominant les secteurs-clés, la constitution d’un puissant secteur privé, le recours aux capitaux étrangers et les transferts de technologie en provenance des pays plus avancés.
Contrairement à ce qu’on dit parfois, c’est Mao Zedong lui-même qui a initié ce processus en 1972 en rétablissant les relations avec les États-Unis.
Pour développer le pays, il fallait dîner avec le diable, et les communistes chinois ont appris à le faire. Il est vrai que cette conduite de l’économie nationale par un État-stratège n’est pas sans rappeler la France gaullienne et sa réussite industrielle.
Mais l’histoire a confié au parti communiste chinois une tâche beaucoup plus lourde : la modernisation accélérée d’un pays immense, peuplé d’un milliard d’habitants en 1980.
Les communistes chinois ont su accomplir des réformes gigantesques et s’adapter à la nouvelle donne résultant de la mondialisation. En Chine, l’État tient fermement le gouvernail du développement économique, la propriété publique reste dominante et le secteur financier privé est sous contrôle. En confiant au Parti communiste une responsabilité sans précédent, la révolution chinoise lui a aussi donné la légitimité sans laquelle il n’aurait pu arracher à la misère le cinquième de l’humanité.
4. Quelle est la politique de prêts adoptée par la Chine à l’égard de pays tiers (Afrique, Amérique du Sud, etc..) ? Quel impact sur le développement de ces pays ?
B.G. : Contrairement à ce que raconte la presse occidentale, l’endettement des pays du Sud n’est pas imputable à la Chine. Au Sri Lanka, par exemple, la crise politique et économique n’a rien à voir avec Pékin, puisque la part de la Chine dans l’endettement du pays ne représente que 10 % du total, tandis que les prêts occidentaux et multilatéraux se taillent la part du lion.
La contribution de la Chine au développement des pays qui ont des besoins d’infrastructures devrait être appréciée au cas par cas. Ce qui est sûr, c’est que Pékin offre ses services à des États en quête d’une alternative crédible aux politiques occidentales.
Bien sûr, le risque est de créer une situation de dépendance excessive entre le prêteur et l’emprunteur, de générer une nouvelle asymétrie. Les Chinois en sont conscients, et c’est pourquoi ils ont conçu leur stratégie internationale à rebours des pratiques néocoloniales. La Chine exporte des produits manufacturés et importe des matières premières. Mais elle monnaye ses importations par des constructions d’infrastructures.
Bénéfique pour la Chine, ce programme l’est aussi pour les pays partenaires. Les institutions financières occidentales exigent en contre-partie de leur concours financier les mesures d’austérité inspirées du « consensus de Washington ». Les Chinois ont battu en brèche cette politique occidentale en lui opposant le « consensus de Pékin » : les pays qui veulent travailler avec eux ne sont pas contraints de privatiser les entreprises publiques, de diminuer les impôts sur les riches ou de déréguler les marchés financiers.
5. Pour la première fois de l’histoire de Chine, presque toute la population est désormais couverte par l’assurance maladie. Quelles sont les étapes de ce progrès ?
B.G. : À partir des années 1980, les réformes économiques ont mis à mal le filet de protection sociale hérité de l’époque maoïste, et les inégalités se sont envolées. La priorité donnée à la croissance du PIB et à l’accumulation du capital s’est payée d’une dégradation des conditions de vie, et on a même relevé, au cours des années 1990, un léger fléchissement de l’espérance de vie.
C’est pour remédier à cette situation que la loi de 1999 a créé la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés urbains. Avec la mise en place d’un nouveau système de santé pour les ruraux, c’est l’ensemble de la population qui va bénéficier de la sécurité sociale.
La généralisation du dispositif s’est poursuivie sans relâche depuis vingt ans, notamment depuis l’arrivée de Xi Jinping au pouvoir en 2012. Aujourd’hui 95 % de la population bénéficie d’une couverture maladie, alors que 50 % de la population mondiale n’en a aucune.
En Chine, la prise en charge des soins est désormais assurée par un système universel, complété par une gamme variée d’assurances facultatives.
Au début des années 2000, la part non remboursée des dépenses de santé représentait près de 60 % des dépenses totales. Mais en 2011 elle chute à 34,7 %, ce qui est inférieur non seulement à la moyenne mondiale (40,8 %), mais aussi à celle des pays riches (40,5 %). En revanche, elle demeurait relativement élevée par rapport à la moyenne européenne (24,8 %).
Aujourd’hui, la part non remboursée des dépenses de santé est probablement de l’ordre de 30 %, et donc beaucoup plus proche des standards européens.
Avec l’élévation considérable du niveau de vie, cette généralisation de l’accès aux soins explique la progression de l’espérance de vie moyenne, aujourd’hui nettement supérieure à celle des États-Unis.
6. La Chine a un gigantesque programme de nucléaire civil. Elle dispose de 50 réacteurs déjà et en construit 4 par an apparemment. Sont-ce des technologies chinoises ou étrangères ? Où en est la Chine avec la recherche sur la fusion thermonucléaire ?
B.G. : Actuellement, sur les 56 réacteurs en construction dans le monde, 20 sont chinois. La production électronucléaire s’accroît sensiblement chaque année et la Chine devrait rattraper les États-Unis dans dix ans. Avec 53 réacteurs couplés au réseau et une puissance installée totale de 54 GW, la Chine se place aujourd’hui à la troisième place mondiale juste après les États-Unis (93 réacteurs et 95 GW) et la France (56 réacteurs et 61,3 GW). Mais elle est déjà en deuxième position pour la production d’électricité nucléaire, et en 2035 il est prévu une puissance nucléaire de 200 GW !
Pour atteindre ces objectifs, la Chine ne se contente plus d’exploiter des réacteurs conçus à l’étranger. En s’inspirant de technologies françaises et américaines, elle a acquis une maturité industrielle qui lui permet de concevoir et construire des réacteurs en un temps record et à un prix imbattable.
Désormais, ce sont les réacteurs chinois de troisième génération qui équiperont les nouvelles centrales en Chine, et peut-être ailleurs dans le monde. En février 2022, l’Argentine et la Chine ont signé un accord visant à construire un Hualong-1 sur un site nucléaire près de Buenos Aires, et ce projet sera financé par un prêt consenti par les banques chinoises.
Après le Pakistan, la technologie des réacteurs chinois s’étend donc à l’Amérique latine.
Cette percée de la filière nucléaire chinoise s’accompagne aussi d’investissements dans les réacteurs surgénérateurs de quatrième génération et les combustibles nucléaires au thorium.
Enfin, la Chine s’engage dans la construction de réacteurs à haute température pour le dessalement de l’eau de mer et une éventuelle production d’hydrogène.
C’est une véritable révolution du paysage nucléaire mondial. En 2019, le directeur de la branche Asie-Pacifique d’EDF déclarait dans une tribune : « Le nucléaire de demain sera chinois. »
7. Du 1er au 7 septembre ont lieu les manœuvres Vostok 2022, avec 50 000 militaires russes, syriens, biélorusses, indiens et chinois, entre autres. Jamais auparavant l’Inde n’avait accepté de manœuvrer avec la Chine. Comment évaluer cet événement sans précédent ?
B.G. : La Chine et l’Inde ont des relations complexes. Les deux géants asiatiques savent très bien que le basculement du monde vers l’Est joue en leur faveur, et ils sont partenaires au sein d’organisations comme les BRICS ou l’OCS. Mais les deux pays ont un contentieux frontalier non résolu et la tension sur le sujet est palpable des deux côtés.
De plus, l’Inde reproche parfois à la Chine d’entretenir avec le Pakistan ou le Sri Lanka des relations privilégiées dont le but inavoué serait de l’encercler ou de la contourner. C’est un mauvais procès, mais les Indiens le voient de cette façon. Cela dit, l’Inde ne veut pas non plus donner l’impression qu’elle se rallie à la croisade anti-chinoise menée par Washington.
C’est pourquoi elle a une politique délibérément ambiguë. Elle a adhéré au QUAD, la structure de coopération militaire promue par les États-Unis dans la région Indo-Pacifique. Quelques mois plus tard, elle participe à des manœuvres militaires conjointes au côté de la Chine et de la Russie. Pour ceux qui n’auraient pas compris, cette attitude signifie que l’Inde demeure fidèle à ce non-alignement qui caractérise sa politique étrangère depuis l’indépendance. Un subtil jeu de balancier qui montre que ce grand pays, en définitive, entend bien se tenir à égale distance des deux principaux rivaux planétaires.
8. Contrairement au Pakistan, la Chine, en dépit d’un climat très difficile, semble avoir pratiquement réglé le problème des inondations monstrueuses. Quelles sont les grandes lignes de son programme hydrologique ? Quelle est la part d’énergie hydroélectrique ?
B.G. : La Chine est numéro un mondial en matière d’énergie hydroélectrique. Un pas décisif a été franchi avec la construction du plus grand barrage du monde, le barrage des Trois-Gorges, qui a profondément modifié le régime hydrologique du plus grand fleuve chinois, le Yangzi. L’hydroélectricité représente aujourd’hui environ 5 % du mix énergétique, soit à peu près autant que le nucléaire. Mais il n’y a pas que l’hydroélectricité. La Chine a massivement investi dans le panel complet des énergies renouvelables. En 2018, avec 20 % de la population mondiale, elle produit 30,1 % de l’énergie hydroélectrique mondiale, 28,7 % de l’énergie éolienne, 31,9 % de l’énergie solaire et 17,5 % de l’énergie issue de la biomasse. Ce sont les paradoxes de l’histoire : après avoir commis l’erreur de reléguer au second rang la question environnementale, la Chine l’a saisie à bras le corps et elle fait aujourd’hui figure de pays phare dans ce domaine.
Venons-en brièvement à des questions plus polémiques.
9. Vu depuis l’étranger, nous peinons à comprendre la politique « Zéro Covid », qui ne semble pas avoir de base scientifique vu la nature protéiforme de tous les virus. Certains avancent la thèse que la Chine croit se prémunir par les confinements renouvelés et des tests incessants, contre une guerre bactériologique (les laboratoires US découverts en Ukraine ont fait l’objet de commentaires nombreux en Chine). Qu’en est-il à votre avis ?
B.G. : Je ne sais pas si un projet aussi démoniaque que celui que vous évoquez existe bel et bien, mais il est clair que les Chinois sont extrêmement prudents sur le sujet. En tout cas, la question de la gestion de la crise sanitaire est une vraie question. Mais avant de critiquer à tort et à travers, regardons les chiffres.
De ce point de vue, il faut reconnaître que la stratégie « Zéro Covid » a porté ses fruits. Avec 5 226 décès en Chine contre plus d’un million aux États-Unis et 151 000 en France, les Occidentaux sont mal placés pour donner des leçons !
Si la Chine a réussi à protéger sa population, c’est parce que les autorités ont rapidement pris la mesure du phénomène, et que l’État a refusé d’arbitrer entre sauver des vies et sauver des points de croissance.
Les faits sont les faits.
Bien sûr, comme toutes les stratégies, la stratégie « Zéro Covid » finira par épuiser ses effets, et il faudra sérieusement envisager la suite. C’est ce que font aujourd’hui les Chinois, qui réfléchissent à un assouplissement progressif du dispositif sanitaire. Les confinements visent à enrayer la propagation du virus dans des agglomérations qui comptent plusieurs millions d’habitants. Sommes-nous suffisamment informés de la situation épidémiologique de la Chine pour pouvoir porter un jugement sur sa politique ? Que se passerait-il si la Chine avait géré l’épidémie à la façon des pays occidentaux ?
Contrairement aux oligarchies qui nous gouvernent, le gouvernement chinois se sent comptable de l’état de santé des populations, même s’il y a provisoirement un prix à payer. Dès que les conditions le permettront, il rectifiera le tir.
10. Les autorités chinoises ont créé l’étonnement, en refusant de tomber dans le piège tendu par la visite à Taïwan du Sénateur Nancy Pelosi puis de ses collègues à Taïwan. Aucun acte irréversible ou irresponsable n’a été entrepris. Quelle est votre évaluation ?
B.G. : Je trouve que la réaction de Pékin à cette grossière provocation des fanatiques du Congrès a brillé par sa fermeté et son habileté. Pas un mort, pas un blessé, mais une démonstration de force inédite, qui rappelle que le retour de Taïwan dans le giron de la mère-patrie est une nécessité historique.
En occupant l’espace maritime et aérien de l’île sécessionniste, le gouvernement chinois rappelle une évidence : les eaux territoriales et l’espace aérien de Taïwan n’existent que dans l’imagination des séparatistes et de leurs protecteurs, car l’île est une province chinoise, et rien d’autre.
Cette occupation étant ostensiblement engagée durant plusieurs jours, la question n’était plus : que va faire la Chine si Nancy Pelosi atterrit à Taipei ? La question était devenue la suivante : que font les États-Unis quand la Chine démontre, en acte et non en paroles, que la souveraineté taïwanaise n’est qu’une illusion ?
Il ne faut jamais oublier que la stratégie chinoise, lorsque le pays est agressé, vise toujours à faire paraître les impérialistes pour ce qu’ils sont, à savoir des « tigres de papier », comme disait Mao.
Les Chinois ne le souhaitent pas, mais si demain l’épreuve de force est engagée entre la Chine et les séparatistes irresponsables de Taipei, les États-Unis vont-ils prendre le risque d’un affrontement majeur avec un pays dont l’armée est aujourd’hui la deuxième du monde ?
11. La diplomatie chinoise semble se défaire de son ancien mutisme concernant les questions stratégiques internationales pour désormais parler franc, notamment en soutien de la Russie. Récemment, un porte-parole des Affaires étrangères a utilisé un jeu de photos pour faire passer le message que l’attentat du 11 septembre 2001 était un « own goal ».
B.G. : Je suis la presse chinoise depuis des années, et je n’avais jamais vu un ton aussi offensif. Mais c’est un phénomène très récent, deux ou trois ans tout au plus. Avec la déclaration de Mike Pompeo désignant le Parti communiste chinois comme « le pire ennemi du peuple américain », la présidence de Trump marque un tournant.
En accusant la Chine de commettre un génocide au Xinjiang, la propagande occidentale franchit une étape inouïe, rarement atteinte, qui mérite de figurer au Guinness du mensonge d’État. Comment peut-on croire de telles âneries ? À mes yeux c’est un mystère. La population ouïghoure a été exemptée de la politique de l’enfant unique, et elle a connu une croissance démographique spectaculaire au cours des 30 dernières années.
Quant aux « camps de concentration » où seraient enfermés « trois millions d’Ouïghours », cette accusation est tellement grotesque qu’elle est insignifiante. L’erreur majeure des Occidentaux, c’est de croire que ces calomnies ont le moindre effet sur la stabilité intérieure de la Chine.
Le peuple chinois sait très bien que son gouvernement a usé des moyens nécessaires pour éradiquer le terrorisme séparatiste et il approuve les mesures sécuritaires qui ont mis fin aux attentats.
Mais cette avalanche de mensonges n’a pas connu non plus un grand succès à l’échelle internationale : à l’assemblée générale de l’ONU, tous les pays dont la population est majoritairement musulmane soutiennent la politique chinoise au Xinjiang.
12. Le monde occidental semble convulsé par son hostilité vis-à-vis de la Chine, dont le peuple est présenté comme malheureux, croupissant sous l’oppression et la répression. Pourquoi cette hostilité ? Jalousie ? Nostalgie de la période faste des Guerres de l’opium ?
B.G. : Si les pays occidentaux sont si hargneux, c’est parce qu’ils voient s’effriter les fondements de leur suprématie.
Après avoir dominé le monde pendant deux siècles, l’Occident stupéfait réalise qu’il va falloir passer la main. Il pensait tenir la dragée haute aux pays du Sud pendant encore un siècle ou deux, mais l’histoire s’accélère.
Les Chinois vivent plus longtemps que les Américains, leur société est plus cohérente et plus tolérante.
Pendant que les navires de guerre des États-Unis croisent au large des côtes chinoises, les Chinois construisent des voies ferrées, des autoroutes, des ports et des hôpitaux à domicile comme à l’étranger.
Pour illustrer les biais cognitifs qui obscurcissent notre vision du monde, je vais prendre un autre exemple.
On nous présente la Chine sous les traits orwelliens d’une dictature totalitaire où les droits de l’homme sont bafoués. Mais en France, depuis le début de l’année, neuf personnes ont été tuées par la police pour « refus d’obtempérer ». Pour un pays qui se dit démocratique, ce n’est pas brillant.
En Chine, en revanche, il ne semble pas que la police ait pour coutume d’abattre des citoyens pour « refus d’obtempérer ». Dans un pays où le moindre incident est commenté par des centaines de millions d’internautes, un tel événement ne passerait pas inaperçu et la presse occidentale le commenterait avec sa bienveillance habituelle à l’égard du gouvernement chinois.
S’il y avait le même taux d’homicides policiers qu’en France, il y aurait eu 180 citoyens chinois tués par balles, dans la rue, au cours des derniers mois. Sauf erreur de ma part, il n’y en a eu aucun.
Pourquoi ? Parce que dans cette dictature abominable les policiers n’ont pas d’armes, tout simplement. Seule la police militaire, chargée de la surveillance des sites sensibles et de la lutte antiterroriste, est armée. On la voit d’ailleurs très peu.
En 2020, j’ai vu deux agents de cette unité à la gare de Kunming, capitale du Yunnan. Il est vrai que le 31 mars 2014 des terroristes séparatistes ouïghours y ont assassiné à l’arme blanche une trentaine de passagers.
Quant aux policiers ordinaires, en Chine, non seulement ils n’ont pas d’armes, mais on en voit beaucoup moins qu’en France.
En Chine comme ailleurs, il y a des violences policières, bien sûr, de même qu’il y a des délinquants et des criminels.
Mais ces fléaux sociaux sont beaucoup moins importants que dans notre merveilleuse démocratie. Et si l’on comparait la Chine avec les États-Unis, le contraste serait hallucinant. Sur la question des droits de l’homme comme sur beaucoup de sujets, il serait temps que le monde occidental balaie devant sa porte.
Source : entretien publié sur la page Facebook de l’auteur
https://www.facebook.com/bruno.guigue.10/posts/2905639962914773
Source de la photographie d’en-tête : Wikimedia Commons (Guywoodland)
Guiyang the capital of Guizhou in China's northwest. Home to 46 of the 56 minority peoples of China [22 April 2014, 15:07:31]
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Guiyang,_Guizhou,_China.jpg
[ Creative Commons ]
Paramétrage
|
|||||
Aspect :
|