Traduit de l’anglais par EDB () • Langue originale : anglais |
Les allégations douteuses de viol par Tel-Aviv à l’encontre du Hamas dissimulent la crise choquante de la violence sexuelle en Israël, où 260 femmes et mineurs israéliens sont violés chaque jour.
Alors que les accusations non fondées d’Israël concernant des viols commis le 7 octobre ont fait la une des médias occidentaux, les cas pourtant documentés et crédibles de viols contre les Palestiniens et d’agressions sexuelles entre Israéliens ont reçu beaucoup moins d’attention.
Le fléau israélien des violences sexuelles et des viols n’est pas apparu il y a seulement cinq mois. Ses racines sont plus profondes et plus anciennes que cela, et il existe un contexte crucial pour comprendre l’environnement national en matière d’agression.
Le 8 février, Haaretz a fait une révélation poignante : 116 dossiers différents détaillent des cas d’agression sexuelle et de violence à l’encontre de femmes et de mineurs, parmi les Israéliens « déplacés » de leurs colonies illégales en raison des conflits militaires en cours à Gaza et au Liban.
Les cas ont fait surface lors d’une commission spéciale de la Knesset sur le statut des femmes et l’égalité des sexes, où « la présidente de la commission, MK Pnina Tamano-Shata [Parti de l’unité nationale], a réprimandé les représentants de la police pour ne pas avoir collecté des données précises auprès de chaque hôtel, par rapport à la violence et aux agressions sexuelles ».
Bien qu’il y ait eu des désaccords sur l’absence de données complètes, des incidents troublants ont été mis en évidence, notamment un cas de pédophilie impliquant un jeune homme de 23 ans établissant une « relation avec une jeune fille de 13 ans, tous deux habitant le même hôtel », et un viol commis après qu’un homme a suivi une femme jusqu’à sa chambre. Il a également été noté que les ascenseurs sont des lieux qui produisent une vulnérabilité particulière pour des agressions et des violences sexuelles.
Les cas d’agression sexuelle ne se limitent pas aux quelque 200 000 colons « déplacés ». Une soldate a également affirmé de façon crédible qu’elle avait été violée par un de ses collègues militaires au cours de l’assaut brutal en cours sur Gaza.
Le harcèlement sexuel et la violence n’ont rien de nouveau au sein de Tsahal. Selon un rapport du Haaretz, « un tiers des femmes enrôlées dans l’armée ont été victimes de harcèlement sexuel au moins une fois au cours de l’année précédente [2022] ».
Le journal note que la plupart des victimes évitent de signaler ce qui leur est arrivé et que « 70 % des jeunes femmes qui ont signalé ce qui leur était arrivé ont déclaré que leur dossier n’avait pas été traité du tout, ou pas suffisamment. »
En 2020, cette crise de la violence sexuelle dans l’armée israélienne a été reconnue après que 31 inculpations seulement ont été prononcées sur les 1 542 plaintes pour agressions sexuelles enregistrées au sein de l’institution militaire.
Il s’agit là d’une mise en cause stupéfiante de « l’armée la plus morale du monde ». Et il n’y a pas que Tsahal qui est touché par le virus du viol.
En plus d’être une plaque tournante régionale pour la traite des êtres humains et un refuge pour les pédophiles, Israël se classe régulièrement au premier rang en Asie occidentale pour les cas documentés de viols et d’agressions sexuelles.
En 2020, des manifestations ont éclaté dans tout le pays après que 30 hommes ont violé collectivement une jeune fille de 16 ans ivre ou droguée, ce qui a incité Ilana Weizman, de l’association israélienne de défense des droits des femmes HaStickeriot, à révéler qu’une Israélienne sur cinq avait été violée au cours de sa vie, 260 cas étant signalés chaque jour.
En mars 2021, une série de viols collectifs sur des mineurs, dont la plus jeune victime n’avait que 10 ans, a suscité une vive inquiétude en Israël quant à la prévalence des agressions sexuelles. L’APCCI a déclaré que le taux d’infractions sexuelles violentes en Israël était 10 % plus élevé que la moyenne des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qualifiant cette situation d’« épidémie ». Un rapport de la Knesset datant de la même année a révélé que près de la moitié des cas d’abus sexuels entre 2019 et 2020 concernaient des filles mineures.
En 2016, des militants du Jewish Community Watch ont averti qu’Israël était en train de devenir un « refuge pour les pédophiles », notant que les délinquants sexuels utilisaient la loi israélienne du retour qui permet à tout Juif de revendiquer la citoyenneté et de vivre en Palestine occupée. Des années plus tard, en 2020, CBS News a publié un rapport intitulé « Comment les pédophiles juifs américains échappent à la justice en Israël », qui montrait comment les individus recherchés restaient libres en Israël, laissant derrière eux une multitude d’affaires criminelles non résolues.
Pour couronner le tout, les médias hébreux ont rapporté que 92 % des enquêtes civiles sur les viols ont été classées sans inculpation.
Selon l’Association des centres d’aide aux victimes de viols en Israël (Association of Rape Crisis Centers in Israel / ARCCI), malgré les « bonnes lois » du pays en matière d’agression sexuelle, leur application inadéquate signifie que les gens ont recours à des « astuces juridiques » pour éviter les représailles en cas d’agression, et que de nombreux agresseurs échappent aux poursuites judiciaires. En bref, « les gens n’ont pas peur de faire du mal. Il n’y a ni crainte ni représailles ».
Parfois, le système judiciaire israélien est connu pour agir, comme dans des affaires de viol et d’agression sexuelle très médiatisées ; en témoigne la condamnation de l’ancien président israélien Moshe Katsav en 2010 pour avoir violé une assistante et harcelé sexuellement deux autres femmes.
Cependant, la libération de Katsav après avoir purgé seulement cinq ans d’une peine de sept ans a déclenché un débat sur la remise en liberté anticipée des délinquants sexuels. En 2022, l’APCCI a indiqué que 75 % des délinquants sexuels en Israël sont libérés avant d’avoir purgé la totalité de leur peine.
Depuis la création d’Israël, le viol a été largement documenté dans son utilisation comme arme de guerre contre les Palestiniens. Dans un documentaire de 2022, Tantura — intitulé d’après le nom du village palestinien qui a subi le massacre israélien —, d’horribles aveux de viols commis par la brigade Alexandroni ont été reconnus pour la première fois devant la caméra.
Il existe également d’autres cas de viols signalés à cette époque : au moins trois, dont un commis sur une jeune Palestinienne de 14 ans, ont eu lieu pendant le massacre de Safsaf en octobre 1948.
Parce que le viol et les autres formes de violence sexuelle sont souvent difficiles à prouver de manière concluante, il est essentiel de savoir que les premiers sionistes ont également brandi la menace de la violence sexuelle, en particulier lors du massacre de Deir Yassin en 1948.
Comme l’a documenté l’historien israélien Ilan Pappe dans son livre Le nettoyage ethnique de la Palestine, des histoires d’atrocités à caractère explicitement sexiste ont été délibérément diffusées pour encourager les habitants d’autres villages à fuir. Lors d’une récente série d’entretiens avec deux survivants de la Nakba, ceux-ci ont révélé qu’ils avaient fui leur village en raison des viols perpétrés à Deir Yassin.
Aujourd’hui, cette même attitude sexualisée contre les Palestiniens vulnérables est apparente dans les innombrables snuff movies partagés largement sur les réseaux sociaux avec l’approbation de Tsahal ; on y voit des soldats hommes israéliens fouiller dans les tiroirs à sous-vêtements des femmes palestiniennes et même porter leur lingerie en se moquant.
Ces images, associées à ce qu’un groupe d’experts des Nations unies a récemment qualifié d’« allégations crédibles » d’agressions sexuelles commises contre des femmes palestiniennes par des soldats israéliens opérant à Gaza, révèlent un schéma clair de violence à caractère sexiste dans le cadre de la guerre.
Au moins deux cas de viol, ainsi que de nombreux cas d’humiliation sexuelle et de menaces de viol, ont également été enregistrés. Reem Alsalem, rapporteur spécial des Nations unies sur la violence à l’égard des femmes et des filles, a noté que « nous risquons de ne pas savoir avant longtemps quel est le nombre réel de victimes ».
En 2002, pendant la seconde Intifada, les soldats de l’occupation israélienne ont pris le contrôle des réseaux de télévision palestiniens dans la ville de Ramallah, en Cisjordanie, pour diffuser de la pornographie sur plusieurs chaînes. Sachant que la société palestinienne est socialement conservatrice, il est clair que cela a été fait dans le but d’humilier.
Un cas récent et marquant d’humiliation sexuelle en Cisjordanie s’est produit l’année dernière près de la ville d’Al-Khalil (Hébron) et a fait l’objet d’un rapport commun Haaretz-B’Tselem. Le 10 juillet, entre 25 et 30 soldats israéliens ont fait irruption dans la maison de la famille Ajluni, obligeant cinq femmes palestiniennes à se déshabiller sous la menace d’une arme et de chiens d’attaque de l’armée.
Une femme, Amal, a été emmenée dans une pièce privée avec ses enfants et forcée à se déshabiller. Le rapport indique que « les enfants ont également dû assister à la scène de leur mère recevant l’ordre de se retourner alors qu’elle était nue et qu’elle sanglotait en se faisant humilier. Environ dix minutes plus tard, elle et les enfants ont été emmenés hors de la pièce, pâles et tremblants ».
S’il n’est pas possible de recenser tous les cas de violence sexuelle perpétrés contre des femmes palestiniennes par les forces israéliennes, il est par contre bien documenté que les prisonnières ont été soumises à certaines des pires formes de ce type d’agression.
Pendant la seconde Intifada, d’innombrables accusations de violences sexuelles sur des femmes et des jeunes filles détenues par Tsahal ont été formulées, une tendance qui, selon le groupe israélien de défense des droits de l’homme B’Tselem, est à nouveau à la hausse. L’ONG a déclaré que les détenues palestiniennes récemment libérées dans le cadre de l’échange de prisonniers entre le Hamas et Israël ont fait l’objet de « menaces de viol » et « ont été humiliées par des fouilles à nu à plusieurs reprises » après leurs arrestations violentes.
Voici une partie du témoignage de Lama al-Fakhouri, 47 ans, enregistré par B’Tselem après sa libération :
« Un interrogateur est entré et m’a demandé en anglais ce que je pensais des actions du Hamas. Il m’a injuriée et m’a traitée de “pute”. Il a dit qu’il y avait 20 soldats dans la pièce et qu’ils me violeraient comme le Hamas-ISIS a violé les femmes juives dans le sud d’Israël. Il a continué à m’insulter et à me menacer, moi et ma famille. Ensuite, une femme soldat est arrivée et m’a emmenée dans une autre pièce, avec d’autres soldates qui m’ont dit : “Bienvenue en enfer.” Elles m’ont assise sur une chaise et ont commencé à se moquer de moi et à me traiter de “pute”, encore et encore. »
S’adressant aux médias après avoir été libérée de la détention israélienne à la fin de l’année dernière, Baraah Abou Ramouz a déclaré ce qui suit au sujet des conditions « dévastatrices » auxquelles sont confrontées les prisonnières palestiniennes :
« Elles sont constamment battues. Elles sont agressées sexuellement. Elles sont violées. Je n’exagère pas. Les prisonnières sont violées. »
En 2022, le Shin Bet a abandonné une affaire d’agression sexuelle à l’encontre d’une Palestinienne détenue en 2015 en raison d’un « manque de preuves ». Pourtant, un médecin et des soldates avaient admis avoir touché de manière inappropriée les parties intimes de la femme, tandis que le commandant de la compagnie avait reconnu en avoir donné l’ordre. L’appel déposé par la victime indique ceci :
« Dans une situation où il n’est pas contesté que des actes constitutifs de viol et de sodomie ont été commis, [dans laquelle] il y a suffisamment de preuves, et où personne n’est puni, cela est scandaleux et insupportable. »
Selon l’ancien fonctionnaire du département d’État des États-Unis, Josh Paul : ses collègues et lui-même ont reçu des preuves crédibles que les forces israéliennes avaient violé un garçon palestinien de 14 ans dans le centre de détention d’Al-Moskibiyya ; Israël a alors perquisitionné dans les bureaux du groupe de défense des droits de l’homme qui avait transmis l’information au département d’État ; par la suite, l’ONG a été déclarée comme organisation terroriste par Israël.
D’un côté, le gouvernement israélien affirme que le Hamas a mis en œuvre le 7 octobre une campagne de viols systématiques et planifiés, pour laquelle aucune enquête indépendante n’a été menée et aucune preuve n’a été apportée. De l’autre, des cas documentés de violence sexuelle sont minimisés ou ignorés.
Le simple fait que le tristement célèbre service de sauvetage israélien ZAKA, qui est la source de beaucoup de témoignages de viols du 7 octobre, ait été fondé par le violeur en série Yehuda Meshi-Zahav, surnommé le « Jeffrey Epstein haredi », est révélateur.
Il est impossible de prendre au sérieux les accusations de viol totalement infondées du gouvernement israélien — largement reprises et amplifiées par les médias occidentaux — lorsqu’une organisation de propagande connue telle que ZAKA en est la source.
Le Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question des violences sexuelles en conflit (Bureau de la RSSG-SVC) a récemment publié un rapport après que sa représentante spéciale, Pramila Patten, a effectué un voyage de huit jours à la demande du gouvernement israélien.
Ce document sur les allégations de violence sexuelle a été rédigé par une équipe de neuf experts des Nations unies ; il n’y avait aucun mandat d’enquête. Pourtant, des déclarations qui en ont été extraites ont fait la une des médias occidentaux, suggérant que l’ONU avait confirmé la thèse d’Israël, alors que le rapport ne l’étayait en aucune façon.
Pour les accusations de violence sexuelle concernant le kibboutz de Be’eri, d’où provenaient la majorité des allégations, aucune preuve n’a été trouvée. Deux cas ont été débunkés par l’équipe des Nations unies qui les a qualifiés d’« infondés ».
Dans l’un d’eux, largement cité comme preuve de viol, une femme a été retrouvée séparée de sa famille et les sous-vêtements baissés. L’équipe de l’ONU a déclaré que « la scène de crime avait été modifiée par une escouade antibombe et que les corps avaient été déplacés ».
Le rapport de l’ONU mentionne également que les interrogatoires des participants présumés à l’opération Déluge d’Al-Aqsa par les services de renseignement israéliens n’ont pas été considérés comme des preuves ; cela porte un nouveau coup à l’ensemble des affirmations d’Israël.
Dans le kibboutz de Kfar Aza, le rapport conclut : « le schéma récurrent des victimes de sexe féminin retrouvées déshabillées, ligotées et abattues […] indique que ces violences sexuelles, y compris d’éventuelles tortures à caractère sexuel ou des traitements cruels, inhumains et dégradants, ont pu avoir lieu ». Mais, il précise également que « la vérification de violences sexuelles sur ces victimes n’a pas été possible à ce stade ».
Une enquête indépendante devrait être nécessaire pour confirmer que les scènes de crime n’ont pas été compromises, étant donné que l’équipe de l’ONU a constaté que les Israéliens en avaient modifié d’autres.
On peut constater également que le récent scandale du New York Times a porté un coup considérable à la crédibilité du récit d’Israël (l’enquête publiée par le journal sur les violences sexuelles le 7 octobre a été immédiatement discréditée par les membres de la famille d’une victime, car les auteurs ont tenté d’affirmer qu’il y a eu viol).
Lors de sa conférence de presse, au cours de laquelle elle a présenté les conclusions de sa mission à l’ONU, Primila Patten a admis que l’équipe n’avait interrogé aucune victime, qu’elle n’avait pas constaté de campagne systématique de violences sexuelles et qu’elle n’avait pas non plus été en mesure d’attribuer les violences sexuelles à un groupe particulier de la résistance palestinienne.
Pour ne rien arranger, un fil de discussion sur X a montré que le chef du Centre national israélien des preuves médico-légales, Chen Kugel, était lui-même responsable de partager de la propagande d’atrocités, pourtant débunkée, telle que le mensonge des bébés décapités.
Dans le cadre de la diffusion répétée d’affirmations non vérifiées et dépourvues d’enquête indépendante, ces allégations explicites et non fondées alimentent la violence sexuelle généralisée à l’encontre des Palestiniens les plus vulnérables.
Israël, aux prises avec ses propres problèmes d’agressions sexuelles, a un passé inquiétant en ce qui concerne l’utilisation de ce type de violence dans sa juridiction militaire. Le manque disproportionné d’attention à l’égard des atrocités perpétrées par l’État d’occupation illustre clairement le deux poids deux mesures perpétué par les médias grand public occidentaux.
Opération « Déluge d’Al-Aqsa » (7 octobre 2023)
Sources :
Source de l’illustration d’en-tête : The Cradle
https://thecradle.co/articles-id/23858
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